Humour, transgression et liberté
Il faut lire ce magnifique éditorial de Riss dans le Charlie Hebdo de cette semaine, dont je me permets de citer de longs extraits.
MMDTG. Au-delà de son titre énigmatique (dont je vous laisse découvrir la signification), et d'une entrée en matière provocante, il nous conduit en effet à réfléchir très sérieusement sur l'humour, ses mécanismes et ses enjeux sociaux, moraux et politiques.
D'abord, cette remarque concernant l'essence de l'humour :
" Le ressort de l'humour est précisément la transgression. On prend la liberté de rire avec quelque chose qui n'est pas drôle ". Et plus loin : " L'humour est une construction de l'esprit, une invention qui se renouvelle en prenant sans cesse des libertés. C'est précisément ce qui insupporte les censeurs : prendre trop de liberté.
Contrairement à ce qu'on croit, la première vertu de l'humour n'est pas de faire rire, mais de s'emparer d'une liberté que personne ne vous a accordée ". Ainsi, Riss explique très bien que l'humour noir est distanciation par rapport au réel, surtout lorsque celui-ci s'avère sordide. La blague du présentateur de télévision est une dénonciation du machisme qui frappe au lieu de parler. L'humour se fait alors dénonciation au second degré de l'inacceptable que l'on veut
cacher ou justifier.
Ensuite, ce texte nous interpelle sur notre responsabilité individuelle et collective, sur la tolérance dont nous sommes - ou non - capables : " Malheureusement, cette liberté n'a jamais été autant remise en cause. Il suffit de lire les réactions sur les réseaux sociaux dès qu'une blague ou un dessin déplaisent. Une armée de censeurs surgit de nulle part et vous envoie aussitôt à la potence. Menaces de mort, injures, et maintenant licenciement... Tous ces braves gens s'imaginent investis d'une moralité exemplaire et sublime qui leur donnerait le droit de dire ce qui doit exister et ce qui ne doit pas exister ".
Ce mécanisme de censure collective, loin de nous renforcer, nous aliène :
" La France ressemble de plus en plus à une classe de lèche-cul toujours prêts à moucharder pour bien se faire voir du maître. Une France de lâches, de corbeaux et de délateurs, qui croient défendre le bien, mais ne défendent que leur servilité ".
Pour ma part, je ne prise guère l'humour noir et sarcastique dont Charlie Hebdo a fait sa marque de fabrique.
Mais l'essentiel est ailleurs. Car je reste convaincu que l’humour, la dérision, la moquerie, la satire sont indispensables ; elles sont une manifestation de la conscience, de la liberté de penser et de s’exprimer, comme je l'écrivais dans mon article "Ultimi Barbarorum ! " en date du 15 janvier 2015. C'est pourquoi je crois que nous avons toutes et tous à nous déterminer par rapport à la place que nous accordons à 'humour dans l'espace public.
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